1. Une synthèse
importante : Louis Réau (1908)
•
La France est à la traîne, depuis qu’elle a
initié le musée public. L’Angleterre aussi, les collections du V&A et BM ne
sont pas mieux présentées que celles du Louvre.
•
L’excellence
de Bode à Berlin, Lichtwark et Brinckmann à Hambourg.
•
« on
a compris que les musées sont faits pour les collections et qu’il faut les
construire pour ainsi dire du dedans au dehors, en modelant le contenant sur le
contenu ».
Réau sur l’Ecole du Louvre
•
« Elle
aurait dû être en même temps qu’un séminaire d’histoire de l’art et un
laboratoire de travail scientifique, une école théorique et pratique de muséographie ».
•
Pas de
cours pour rédiger les catalogues, classer et présenter les tableaux. Les cours
dégénèrent en vulgarisation artistique à l’usage des femmes du monde.
Notes complémentaires de Réau en 1909
•
« Ils
[les Américains] prétendent faire du Musée une institution véritablement
démocratique qui, comme l’Église, la maison du Peuple ou l’École, soit un des
foyers où se concentre et s’épure la vie de la cité. »
•
« La
vie d’un musée ne se mesure pas seulement au nombre et à la valeur de ses
acquisitions, mais à son influence et à son rayonnement moral » : d’où un
droit d’entrée nul, catalogues, étiquettes, commodité, salle de concert,
promenades guidées, etc.
2. Le nouveau monde
des musées
Charles
Wilson Peale
George Brown
Goode (1851-1896)
« Le musée est une institution dédiée à la préservation des objets qui illustrent les
phénomènes de la nature et les œuvres de l’homme, et à l’utilisation de ceux-ci
pour le développement des connaissances, pour la culture et l’épanouissement
des gens. »
G.
Brown Goode
Les Principles of
Museum Administration
•
Le
musée dans son environnement (relations aux autres lieux de savoir)
•
La
relation avec la communauté
–
responsabilités
mutuelles du musée et de sa communauté.
–
Le
musée est responsable : pour l’avancement de la connaissance ; pour
la préservation (par exemple des types), comme annexe de la classe et
salle de conf. ; pour donner des informations spécifiques ; pour la
culture du public.
•
Cinq fondamentaux de l’administration muséale
1. Une
organisation stable et
permanente.
2. Un
plan bien défini, adapté à la
communauté, spécifique au musée (du but, de la collection)
3. De
bonnes collections et des moyens
pour les créer ou développer, une politique de collection
4. Du
personnel: un musée sans un bon
personnel est aussi inefficace qu’une école sans professeur
5. Un
bâtiment simple, sobre, conçu
par et pour le personnel et adapté aux buts du musée
Community
•
Terme régulièrement utilisé dans les pays
anglo-américains, ne connaît pas réellement d’équivalent français,
•
l’ensemble des personnes et instances concernées à
différents titres :
–
1) les publics,
–
2) les spécialistes,
–
3) [les] autres personnes jouant un rôle dans
l’interprétation (presse, artistes…),
–
4) ceux qui contribuent au programme éducatif par
exemple des groupes artistiques,
–
5) [les] dépôts et lieux de conservation, notamment les
bibliothèques, les organismes chargés du stockage, les musées
(American association of museums, 2002)
Museum
Work: 1919 - 1924
Benjamin Ives Gilman
•
Contre
Goode : Un musée de sciences est une collection de labels et leurs
illustrations, un musée d’art est une collection d’objets et leur
interprétation
•
Les
musées sont « des expositions permanentes d’objets réunis en fonction de
leurs qualités artistiques (musées de beaux-arts) ou leur valeur éducative,
(musées de sciences ou d’arts appliqués) »
•
Gilman
et l’œuvre d’art :
•
La
compréhension d’une œuvre d’art réside dans la pure utilisation des facultés de
perception sur un objet de création humaine ; les buts de compréhension
artistique et d’instruction s’excluent : « lorsque le règne de
l’éducation commence, le règne de l’art se termine. »
•
Éclairage
(à claire-voie), prévention de la fatigue muséale, exégèse de l’œuvre.
John Cotton Dana
•
80 musées vivants sur les 600 que comptent les
États-unis. Ceux-là font un travail véritable.
•
Les
musées conventionnels ne sont que des collections, très peu utiles.
•
Le
musée comme établissement d’instruction visuelle.
•
« Il
est aisé pour un musée d’acquérir des objets, il est bien plus difficile
d’acquérir des cerveaux ».
•
Les cerveaux doivent se battre contre les musées qui ne
sont que des bâtiments, les collections et les muséographies à la mode. Ils
doivent se battre pour la conception de collections, de bâtiments etc. dédiés à
l’éducation de leur communauté.
Paul Valéry, 1923
« Je
n’aime pas trop les musées. Il y en a beaucoup d’admirables, il n’en est point
de délicieux. Les idées de classement, de conservation et d’utilité publique,
qui sont justes et claires, ont peu de rapport avec les délices. »
Contre
l’abondance des chefs d’œuvres. Contre « ces solitudes cirées, qui
tiennent du temple et du salon, du cimetière et de l’école… Suis-je venu
m’instruire, ou chercher mon enchantement, ou bien remplir un devoir et
satisfaire aux convenances ? ».
Trop de
génie… « Nous devons fatalement succomber. Que faire ? Nous
devenons superficiels. Ou bien, nous nous faisons érudits. En matière
d’art, l’érudition est une sorte de défaite ».
Une vision opposée à Proust : « … le chef-d’œuvre que l’on regarde en
dînant ne nous donne pas la même enivrante joie qu’on ne doit lui demander que
dans une salle de musée, laquelle symbolise bien mieux, par sa nudité et son
dépouillement de toute particularités, les espaces intérieurs où l’artiste
s’est abstrait pour créer » (Proust, A l’ombre des jeunes filles en
fleur)
Voir Adorno, Valéry-Proust Museum
Henri Focillon, 1921
« On
ne va pas pour se renseigner dans les concerts : on essaye d’y être
heureux…. Il faut que les musées soient considérés comme des espèces de
concerts ».
•
Le
musée romantique, destiné à l’éducation et la joie des artistes ;
•
Le
musée de Taine, destiné aux historiens de l’art.
•
Troisième
point de vue « Quelque paradoxal que cela puisse paraître, je n’hésite pas
à dire que les musées sont faits pour le public ». Naissance de l’idée en
France (à la Révolution :
Conservatoire et pour les artistes)
« Un
musée n’est ni un museum ni un laboratoire, c’est un luxe public, une leçon de
goût ».
« On
vient ici, non pour juger, mais pour apprendre, et, plus encore que pour
apprendre, pour être heureux et pour aimer ».
Muséologie ou
muséographie ?
« Mais notre but principal est de soumettre à la
critique compétente des naturalistes spécialisés en muséologie la conception
nouvelle du Musée d’Histoire naturelle »
(Gustave
Gilson, 1914)
« il serait aussi très utile de créer un enseignement
de muséologie pour éduquer nos employés de Muséum, qui doivent préparer les
objets, les conserver, les présenter »
(Adrien Loir,
1922)
« Un grand effort a été entrepris, surtout depuis une
vingtaine d’années, dans les divers pays, pour assurer la conservation
rationnelle des œuvres d’art, aussi bien que leur mise en valeur. Après cette
période d’expériences de tous genres et de réalisations multiples, il importait
de faire le point, de marquer l’évolution des principes, des données, des
travaux et des programmes des musées, – autant d’éléments qui ont contribué à
former un technique nouvelle : la muséographie » (OIM, 1934)
Georges Salles à
l’exposition de 1937 (Le Regard)
« La galerie du vestibule est pavoisée de textes. Une
petite phrase, que le peintre avait glissée dans sa correspondance, vole
au-devant de nous en lettres d’affiche suivie d’un essaim de propos non moins
dynamiques. Des gerbes d’images projettent en parcelles chatoyantes l’histoire
du génie, ses tourments, son labeur, sa folie, tandis que le caractère
typographique s’affirme en noir et blanc et dégage son style » (Salles,
1939 :51)
« À cette fin on se hâte de priver [le grand public] de
ce qui jusqu’alors séduisait une soi-disant élite. On y substitue une sorte de
leçon de choses, à laquelle seule, paraît-il, sont capables d’atteindre les
facultés encore bornées de ces masses. Celles-ci ne tarderont pas à
s’apercevoir qu’on leur soustrait ainsi l’essentiel. Lorsque des objets
possèdent une valeur plastique, ils détiennent une telle force suggestive qu’il
est plus aisé de la rendre perceptible que d’en détourner l’attention »
(Salles, 1939 : 55).